Les Explorateurs La créature était de la taille d'un poney. Un pelage dru et brun la recouvrait complètement, cachant la moindre parcelle de peau ou tout autre organe pouvant la constituer. Depuis leur atterrissage, ils n'en avaient jamais vu d'aussi grosse, et encore moins velues. — Et si je le rasais, tenta Igor. — Non, ça pourrait le tuer, objecta Katya. — Ou pire, le vexer, rajouta Greg craintif. L'octopode trépignait d'impatience. Les êtres abjects, qui, non content d'être aussi lisses qu'un Hk'Cijz, lui bloquaient le passage. Ils commençaient sérieusement à lui casser les Jk'ygf. Il télépatha : — Ghk'Zw, bloké par étraanj'. Retard. Ghk'Zw répondit avec fureur : — X'oohz, magne-toi le Ghi'xd ! X'oohz rugit d'impuissance. Depuis le temps qu'il voulait ce fameux Hux'zh aux Khh'rd, voilà qu'il tombait sur des emmerdeurs. En tant que maître des lieux, c'était aux intrus de s'écarter de sa route, et pas à lui de les contourner ; principe d'honneur, quoi ! — Peut-être qu'on le dérange ? suggéra Katya inquiète. — Mais non ! Ça doit être une vache locale. Ça craint rien, déclara Igor confiant. Afin de prouver son assertion, il caressa les poils ondulants de la masse hirsute. Les conséquences furent désastreuses. Dès que son doigt entra en contact avec l'extra-terrestre, leurs âmes s'échangèrent instantanément. Submergé par des millions d'esprits télépathes étrangers, Igor perdit tout contrôle. Face à lui, son corps subit de formidables convulsions, tel un épileptique en pleine crise. Greg bascula dans une peur panique. Les tirs en rafale de son arme retentirent dans la plaine silencieuse. Katya l'assomma aussitôt avant qu'il ne tue quelqu'un. Évitant de toucher le monstre velu qui dansait une sorte de rock'n'roll en accéléré, elle traîna ses deux compatriotes jusqu'au vaisseau spatial. Elle allongea à Greg sur sa couchette et recouvrit Igor d'une couverture. Ce dernier grelottait en laissant dégouliner une mousse blanchâtre par sa bouche entrouverte. Craignant pour la vie de son compagnon, elle décolla rapidement, oubliant toutes les précieuses données qu'il avaient accumulé dans les ordinateurs du campement. Pendant le voyage de retour vers la Terre, Greg se remémorait indéfiniment la scène de sa peur panique qui avait failli coûter la vie à ses coéquipiers. Lorsqu'ils pénétrèrent dans l'atmosphère terrestre, Igor sorti de sa léthargie en hurlant comme un damné. Le cri suraigu leur vrilla la tête, puis il mourut juste après. Bloqué à l'intérieur du corps de l'explorateur, X'oohz devint complètement dingue. C'est la première fois qu'il était séparé de la communauté. Reclus dans le cerveau humain, il lançait ses ondes psychiques à la recherche du moindre réseau d'êtres pensants qui pourrait alléger son martyr. Soudain, il perçut une foultitude d'âmes. Malheureusement pour lui, il y en avait bien plus que sur Th'Dw'yX, son monde natal. De plus, elles ne communiquaient pas entre elles. Cloisonnées, elles débordaient cependant d'une vigueur commune, celle de la violence et de la folie. Cela dépassait son entendement. Craignant que ces créatures puissent de nouveau revenir chez lui, il se sacrifia en effaçant dans les milliards de cerveau tout ce qui concernait cette mission. ***** Une dizaine d'années plus tard, un espion américain découvrit un vieux dossier dans les archives du centre d'exploration spatial de Kiev. Tout y était : les analyses spectrales décrivant un monde habitable et un exposé favorable à l'exploration. Par contre, aucun rapport d'expédition. Il emporta le dossier qu'il revendit une fortune à un groupe d'industriels véreux qui rêvaient de conquête spatiale et de retombées économiques aux dimensions cosmiques. Deux ans plus tard, une nouvelle équipe de trois chercheurs privés s'envola pour Proxima III. Ils découvrirent un monde parfaitement viable. Les dix premiers jours furent formidables : chaque plante, chaque caillou, chaque animal était étudié, photographié, examiné, épluché, disséqué. Lors d'une reconnaissance de l'autre côté de la colline violacée qui trônait au nord de leur campement, une rencontre changea leur vie — et à posteriori celle de la terre derechef. La créature était de la taille d'un poney. Un pelage dru et brun la recouvrait complètement, cachant la moindre parcelle de peau ou tout autre organe pouvant la constituer. Depuis leur atterrissage, ils n'en avaient jamais vu d'aussi grosse, et encore moins velues. — Et si je le rasais, tenta John… Caïthness:gewissaehotmailfr